Le lombricompostage… Késako?
Également nommé « vermicompostage », ce procédé de compostage en intérieur consiste à recréer les conditions de vie favorables aux décomposeurs des déchets organiques de nos cuisine (les biodéchets), dans un espace clos et (le plus souvent) multi-étagé.
Destiné aux usagers ne disposant pas d’un jardin pour composter en bac ou en tas (en extérieur), le lombricomposteur pourra être entreposé dans la maison (cuisine, cellier…) en respectant certains paramètres spécifiques (température de la pièce, types de matériaux secs utilisés) ou communs au compostage domestique classique (aération, taux d’humidité, équilibre des apports…).
La taille du lombricomposteur sera déterminée par la quantité et la fréquence d’apports de biodéchets. De nombreux modèles existent, vendus dans le commerce ou « faits maison ».
Il s’agit ici « d’élever » des micro-organismes (bactéries, champignons…) et des macro-organismes (vers Eisenia sp., collemboles, acariens…) afin de créer et de pérenniser un bénéfice réciproque (mutualisme).
Leur développement et leur efficacité étant conditionnés à leur bonne santé, on veillera à leur fournir un espace de vie adéquate et des aliments adaptés qu’ils transformeront en compost et en lombrithé (jus de compost noir et riche en nutriments).
Excellente nouvelle! Ces aliments font parties des 20 à 40% de déchets organiques fermentescibles (matière azotée et carbonée contenant de l’eau) qu’il est indispensable de soustraire de nos poubelles d’ordures ménagères résiduelles (OMR).
Malodorantes lorsqu’elles entrent en fermentation, elles sont sources d’importantes pollutions et de coûts exorbitants pour la Collectivité lorsqu’elles sont collectées pour être « au mieux » triées, « au pire » enfouies ou incinérées.
Une hérésie lorsqu’on connait les bénéfices offerts par le retour au sol de la matière organique et des nutriments qu’elle contient.
Sous forme de compost:
- Favorise l’activité biologique du sol (micro/macrofaune, fongique, bactérienne)
- Améliore sa capacité de rétention en eau
- Structure, aère… reconstitue et conserve les sols vivants
- Apporte des éléments nutritifs essentiels au développement et à la santé des plantes
Sous forme de lombrithé aussi appelé « thé de compost »:
- Liquide très concentré en éléments nutritifs, minéraux et oligo-éléments (solubles)
- Excellent fertilisant pour les plantes, 100% naturel et gratuit
Le lombricompostage, en plus de participer à la réduction et à la valorisation des déchets, est un merveilleux outil pédagogique permettant de sensibiliser au cycle de la matière et au vivant.
Comment ça fonctionne?
- Dans un lombricomposteur étagé, les vers Eisenia ont tendance à « voyager » du bas vers le haut (d’un étage à l’autre) au fur et à mesure des apports de nourriture et selon son stade de décomposition (maturation).
- Les jus (eau contenue dans les épluchures se chargeant de nutriments = lombrithé) percolent quant à eux du haut vers le bas.
- Les trous de drainage situés au fond des bacs (à l’exception de la base munie d’un robinet) permettent à l’eau et aux vers de circuler librement.
- Les parois opaques du lombricomposteur maintiennent une obscurité indispensable aux vers, collemboles et autres décomposeurs (ils sont dits « lucifuges »).
- Le milieu de vie des décomposeurs doit être suffisamment aéré et humide (à contrôler). L’apport de matière sèche structurante et absorbante, légèrement brassée en surface avec les biodéchets assure une aération passive.
- Un vers Eisenia adulte en bonne santé, pesant environ 300 mg peut ingérer l’équivalent de la moitié (à une fois!) de son propre poids par jour. 1 kg de vers absorberait entre 180 et 260 kg de matières organiques en décomposition par an… A vos pesées!
Évitons les confusions…
Les vers utilisés en lombricompostage (et dans toute forme de compostage, en général!) sont ceux que l’on nomme également « vers de compost » ou « vers de fumier », en particulier ces trois espèces:
- Eisenia foetida
- Eisenia andreï
- Dendrobaena veneta
Bien que l’appellation « lombricompostage » puisse prêter à confusion, il ne s’agit pas d’utiliser des vers de terre adultes (Lombric commun, lombric bleu, lombric rose, vert, marbré, à queue noire… famille des Lombricidés) avec lesquels on confond souvent.
Certains d’entre eux, bien que vivant et se nourrissant sur le sol/sous la litière au stade juvénile, vivent ensuite dans le sol au stade adulte (endogés et anéciques géophages et saprophages) où ils remplissent d’autres fonctions toutes aussi essentielles.
Donc, pas de « vers de terre » au lombricomposteur… sous peine de les voir mourir!
Démarrer un lombricomposteur:
- Préparez une litière dans le bac posé sur celui destiné à récupérer les jus (la base munie d’un robinet).
Vous pouvez mettre une feuille de papier journal, du carton déchiré et humidifié mélangé à des biodéchets, et un peu de compost récupéré dans un composteur d’extérieur. Ce dernier peut être frais (environ 6 mois); il jouera un rôle d’ensemenceur en micro-organismes, collemboles, acariens… et vers.
Veillez à ne pas obstruer l’ensemble des trous au fond du bac au risque de réduire l’aération (risque de fermentation).
- Déposez vos vers sur cette épaisseur de litière. Ils vont rapidement s’y enfouir.
- Après une première semaine sans aucun apport, apportez en petite quantité des épluchures découpées, en veillant à y adjoindre de la matière sèche elle aussi découpée, en quantité équivalente.
- Au fil des semaines, augmentez très progressivement vos apports de biodéchets / matières sèches, en évitant certains aliments que les vers n’aiment pas trop (peaux d’agrumes ou d’alliacées).
- Après chaque apport / brassage et avant de refermer le couvercle du bac, recouvrez d’une natte en fibre (coco, jute, lin) ou d’un carton humide afin de maintenir une bonne hygrométrie.
- Veillez à entreposer votre lombricomposteur dans un endroit où la température est stable, ne descendant pas en-dessous des 15°C et ne dépassant pas les 25°C. Un balcon ou une terrasse en été ou en hiver ne conviendront donc. Adoptez-le en cuisine!
Maintenez vos sens en éveil!
- Ayez le nez aux aguets, surtout au début, afin de détecter au plus tôt toute manifestation olfactive suspecte, signe d’un potentiel déséquilibre.
Causes probables: trop d’apport de biodéchets, manque d’aération, début de fermentation
- Un contrôle visuel de la densité de vers dans le lombricomposteur aide parfois à estimer la ration de biodéchets à leur apporter.
- Tendre l’oreille au-dessus du bac d’apport permet de s’assurer que les vers « travaillent » en ingérant vos biodéchets (leur nourriture). Mmmmm!… ce petit son caractéristique… « scroutch, scroutch »!
- Lorsque les vers sont acclimatés et nombreux, bénéficiant d’une ration adaptée à leur régime et à leur densité, la dynamique est lancée et vous pouvez augmenter la quantité de biodéchets.
Ce que l’on y met… ou pas:
OUI: marc de café, thé avec filtre, épluchures et restes de fruits et légumes, coquilles d’œufs réduites en poudre, fleurs coupées, essuie-tout, carton ondulé, sachets en papier-kraft, rouleaux de papier-toilette, boite d’œufs
NON: pelures d’agrumes, d’ail / oignon / échalote, pain et restes de repas (gaspillage alimentaire), gros morceaux / trognons de choux (découper en petits morceaux)
Remarque:
L’idée répandue selon laquelle on ne devrait pas mettre de pelures d’agrumes ou d’ail / oignon / échalote au composteur s’explique par le fait que ces éléments contiennent des substances vermifuges… à ne pas mettre au lombricomposteur sous peine de voir disparaitre vos vers.
En revanche, dans un composteur (en bac ou en tas), la quantité et la diversité de décomposeurs présents aux côtés d’Eisenia sp. est telle, que que tous les types de pelures son décomposés.
Fréquence de vidange et utilisation du lombricompost et du lombrithé:
Variable en fonction de nombreux paramètres: dynamique des populations de décomposeurs, nature des biodéchets, quantité / fréquence des apports…
- lombricompost: comptez entre 2 et 4 mois pour l’obtention d’un compost mûr, plus « gras » qu’un compost « classique » en bac ou en tas. Pour récupérer les vers, procédez à la technique des « petits tas ».
Utilisé comme un amendement au jardin (incorporé en surface et paillé, jamais enfoui profondément) ou à l’occasion d’un rempotage de plante d’intérieur à raison d’1/3 de lombricompost pour 2/3 de bonne terre (également utilisable en surfaçage)
- lombrithé: environ 1 fois / semaine. C’est aussi l’occasion d’observer si quelques vers se sont retrouvés piégés dans le jus de compost, auquel cas on aura à cœur de les sauver de la noyade.
Pour l’arrosage, en dilution à 10% (avec de l’eau de pluie… de préférence). Les plantes d’intérieur en raffolent!
En pulvérisation foliaire, on préférera une dilution à 5%, notamment pour les orchidées (racines aériennes) et les jeunes plants (système racinaire peu développé).
Attention, le thé de compost peut tacher les feuilles (vigilance pour les plantes ornementales d’intérieur ou d’extérieur).
Pour aller plus loin…
- Sites internet
http://mesdechets.passerelles.info/ecole/autres-ressources/les-lombricomposteurs-manufactures/
- Tuto
Fabriquer son lombricomposteur
- Ouvrages
–
Association Compost et Territoire
3210 Route de la Vaumane – 26400 CHABRILLAN
Siret: 80949932000020 – Organisme de formation n° 84260254126